Chaque année, nous obtenons des thés qui sont récoltés au printemps, mais 2020 est une année bien particulière, les envois, tout comme les voyages étaient quasiment impossibles. Cet automne, nous avons obtenu avec beaucoup de difficulté et de conditions à remplir un visa pour Taïwan. Celui-ci nous a permis de visiter une grande exposition annuelle de thés (http://enteaexpo.mmweb.tw) . Nous avons ainsi fait la connaissance d’un producteur de thé Oolong de Li Shan situé à plus de 3000 m d’altitude. De plus après une mise en quarantaine obligatoire, nous avons été libres de voyager à notre guise, nous avons ainsi pu rendre visite aux producteurs de thés locaux que nous connaissions bien. Nous avons eu la chance d’avoir pu participer à des dégustations professionnelles de thés primés dont le plus cher se vend aux environs de CHF 60’000.- le kilo.
Les Taïwanais ont une façon particulière de classifier les thés notamment avec une roue de couleurs.
Les thés froids de Taïwan qui sont vendus dans les petites échoppes ou les cafés ne ressemblent en rien aux thés froids que nous trouvons chez nous. (La phrase n’est pas très claire- je dirai plutôt ici : … ne ressemblent en rien aux thés froids que nous trouvons chez nous en Europe.) Ces thés ne contiennent aucun sucre, ils sont faits à partir de thés de très bonnes qualités. Quant au café, il est entré dans leur quotidien avec beaucoup de microentreprises qui le torréfient elles-mêmes. Les Taïwanais n'utilisent pas de machine, mais le filtrent. Leur façon de faire est très intéressante, leur mélange aussi, par exemple du café froid avec un jus de citron ou un excellent café avec du lait d’orge.
Une amie nous a proposé de passer un moment privilégié dans un endroit très spécial: le restaurant de Shi Yang (http://www.shi-yang.com/). Il est localisé à environ une heure de voiture du centre de Taipei dans les montagnes. Il se situe notamment au milieu d'une forêt dense. L'accès se fait par une petite route étroite qui descend brusquement dans la pente de la forêt au bord de la route principale. L'endroit est idyllique et ressemble plutôt à un temple zen qu'à un restaurant. La pluie de la journée a donné à l'espace intérieur un calme méditatif ouvert sur un extérieur doux et riche en plantes avec parfois le chant des oiseaux. Dans la matinée, durant un moment amical autour d'un thé noir du nord de la Birmanie préparé par une charmante et discrète dame, nous avons fait la connaissance du propriétaire des lieux, un architecte designer. Nous nous sommes ensuite déplacés dans la salle du restaurant pour goûter la cuisine d'un chef japonais. Je ne me souviens plus exactement du nombre de plats que nous avons reçus, tant ceux-ci étaient riches en goût et en couleurs, présentés dans des plats aux formes et aux couleurs toutes différentes.
J’ai appris par l’intermédiaire de l’ambassade de Taiwan en Suisse qu’une exposition de thé, café et pâtisserie avait lieu à Taichung, la semaine où nous sommes à Taiwan. Nous avons donc modifié l’organisation de note séjour pour y participer.
Lorsque nous avons découvert le premier stand de thé, nous avons été interpellés par la présence de deux petites filles. La maman nous a invités à déguster ses thés et nous nous sommes assis. Heureusement qu’elle parlait un petit peu l’anglais, mais c’est une dizaine de minutes plus tard que son frère, Tim, est venu à son secours linguistique. C’est ainsi que nous avons pu savoir d’où venait leur thé, la philosophie de culture de la famille, l’endroit où leur thé est cultivé. Après une bonne heure de discussion, la soeur de Tim nous a proposé de venir chez eux le lendemain pour voir leur plantation et la cueillette qui était prévue le matin. Nous avons donc à nouveau modifié notre séjour pour rester une journée de plus dans cet endroit.
Le lendemain, Tim est venu nous chercher à l’hôtel pour nous emmener proche du Sun Moon lake, là où se trouve la ferme de thé de sa soeur. En arrivant, nous avons découvert, une jolie maison avec un espace dédié au thé, un jardin de thé d’un coté, des orchidées pour l’exportation de l’autre, des cultures de champignons toutes proches et des poules noires libres qui pondent de petits oeufs verts pâle, et trois petits enfants qui nous regardaient avec air interrogateur. La philosophie de la famille Wang est de cultiver des théiers sans aucun pesticide, en respectant la nature pour produire un thé de haute qualité.
Les tâches sur les feuilles sont dues à un insecte qui provoque une irritation de la plante. Ces dernières sont très recherchées, car elle donne au thé un goût très particulier avec une note de miel. Ce sont avec de telles feuilles que le thé « beauté orientale » est produit.
À Yilan, le producteur Xin Shen a reçu cette année un premier prix pour son thé noir. Toutefois, ses Oolongs m’intéressaient fortement, parce que j’ai déjà eu l’occasion d’en déguster.
Il nous a invités à passer en revue le processus complet d’un thé vert afin de le ressentir pleinement. Tôt le matin, mais avec un soleil déjà bien chaud, et des champs de thé pleins moustiques, nous avons récolté un peu de thé. Nous avons ainsi pu sentir la facilité avec laquelle nos doigts pouvaient prendre le sommet des jeunes pousses avec un bourgeon et deux feuilles, mais aussi la dextérité qu’il faut avoir pour récolter rapidement 100 grammes de feuilles fraîches. Après cette petite récolte, nous sommes retournés à la ferme où nous avons commencé le processus de fabrication en chauffant durant 5 minutes par brassage les feuilles à 250 degrés dans un four. Nous avons ensuite roulé les feuilles à la main, puis nous les avons séchées durant un quart d’heure dans un four. Le résultat était acceptable, mais le roulage n’était pas suffisamment long et les feuilles avaient peu de goût, et cela malgré le fait que les feuilles étaient d’excellente qualité. Nous avons ainsi pu ressentir combien la maîtrise du processus est importante, même si le produit de base est excellent.
Le nom de ce thé provient du village nommé Longjing. Ce thé primeur est en principe réservé pour le gouvernement et la haute société chinoise. Il est considéré comme l'un des dix meilleures thé vert de la Chine.
Variété de Xihu Longjing, autrefois délaissée par les paysans à Longjing village et aujourd'hui replantées et recultivées. Ses feuilles sont "vert-brun" et duveteuses.
Sous le regard bienveillant de Mr Tang, je passe au tamis les feuilles fraîches de thé.
J'apprends comment cueillir les bourgeons du Longjing avec les cueilleuses.
J'ai découvert dans la forêt de Hangzhou des fleurs géantes qui ressemblent à des orchidées vivant sur un arbre.
Mr Tang est le roi des sécheurs de Xihu Longjing.
Mi vérité ou mi légende : il se dit que le soir, des jeunes filles se déplacent en barques sur le lac de Ho Tay. Elles déposent une poignée de thé vert sauvage dans des fleurs de lotus épanouies, et les marquent pour les retrouver. Dès que le soleil disparait, les corolles des fleurs se rétractent. Le thé enserré dans ce réceptacle se laisse parfumer par les fragrances précieuses du lotus. Le thé en une nuit, guidé par les étoiles, aura accordé son arôme avec les essences de la fleur, lien entre la terre et le ciel. Le lendemain, à l’aube, les floricultrices se faufilent parmi les perles de rosée sur les feuilles de lotus pour cueillir les précieuses fleurs encore closes.
Mais les jeunes le préfèrent léger et doux, de couleur jaune. Le parfum raffiné de la fleur de lotus est finement dosé : ni trop, ni trop peu. Sa saveur a une amertume légère insolite sans être désagréable. Celle-ci devient recherchée, attachante et captivante
En marchant sur un chemin en terre battue, nous avons atteint une sorte de baraque en bordure du lac Ho Tay, Totalement isolée, construite sur pilotis, toute de bois grisé par le temps, elle est close coté terre. C’est l’habitation d’un couple qui cultive les lotus. Côté lac, la façade est plus ouverte par des pans à claire voie encadrant un petit portail. Un ponton débarcadère affleurant les eaux prolonge le bâtiment.
Dans chaque fleur récoltée, du thé vert est déposé puis le tout est enveloppé dans une feuille de lotus. Puis avec des fibres de raphia, les plis de la feuille sont enserrés en ampoule. Le thé est confiné dans la fleur. Ces boules peuvent être conservées au froid, et sont sorties pour préparer du thé aux grandes occasions.
A Ha Noi, dans une ruelle se trouve un salon de thé très connu, dirigé par Hoàng Anh Suong. Représentant la cinquième génération d’une famille, il perpétue tout un savoir-faire, une tradition pour la préparation, le conditionnement du thé. Il en assure aussi la commercialisation. J’ai eu l’occasion de venir un matin tôt pour découvrir cet art ancestral de l’élaboration du thé vert parfumé au lotus.
Au commencement, les anthères (dénommées aussi “grains de riz”) sont scindés des étamines de chaque fleur de lotus. Ces grains d’or sont répartis avec soin sur le thé vert reposant sur de grandes feuilles de lotus. Cette composition est assemblée pour être ensuite confinée dans une grande jarre. Les parfums délicieux s’exhalent, se mélangent, fusionnent avec le thé vert. Les feuilles s'imprègnent harmonieusement de senteurs rares, raffinées... A terme, par des tamisages méticuleux, les grains seront isolés. Le thé vert, recelant un trésor pour les sens, est devenu encore plus précieux.